Re: Ze colle

[Jacques Andre <Jacques.Andre AT irisa.fr>]

Thierry Bouche wrote:
> 
> le JT de 20 h me pose une colle :
> quel a été le premier caractère numérique de toute l'histoire
> cybernétique ?
> 
> Je pense qu'il s'intéresse tout de même plutôt aux vrais caractères pour
> imprimer avec des vrais ouvrages, plutôt qu'aux choses affichées à 
> l'écran ou percées dans une carte à trous.
> 
> Mon sentiment est que ça se passait du côté de chez URW, mais quand, et
> quoi ??

Effectivement, la question n'est pas claire et a sûrement des réponses
diverses selon le sens donné à numérique et selon ce qu'on regarde (le
résultat imprimé ou la façon de le faire).

Si numérique signifie discrète, composé par éléments, alors les lettres
des mosaïques romaines ou celles des abécédaires au point de croix en
sont ! De même que ces publicités et nouvelles affichées sur tableaux
lumineux en ville (qui datent d'avant la guerre 39-45 m'at-on dit ; en
tout cas je crois me souvenir en avoir vu à St Lazre vers 1950).

Si tu parles d'emploi d'ordinateur pour « imprimer » (noircir du papier
ou des films offset), là aussi il y a plusieurs évolutions.
Les premières photocmpo étaient basée sur la projection d'images
pré-gravées sur un film ou un disque et ne relèvent donc pas de cette
technique. Pour la petite histoire, le premier mot photocomposé a été «
xoras » en utilisant un caractère ressemblant à une garalde ; mais les
premières démos officielles (Waldorf-Astoria, avril 1949) utilisaient
une linéale.

La "digitalisation" a commencé par l'emploi de tubes cathodiques et des
images tramées. La première photocompo digitale commerciale est
effectivement allemande  mais pas d'URW qui a été créée en 1973 : il
s'git de la digiset de Hell, présentée en 1965. Toutefois, selon Lynn
Rugle, les premières lettres dessinées par CRT+rasters semblent dater de
1964 (Ã  Standford je crois) mais je ne sais pas de quelle police il
pouvait s'agir ! 
A priori, ces bitmaps ou images tramées de lettres étaient initialement
dessinées à la main sur une grille agrandie (c'est la technique qui a
été employée par Frutiger, Mandel, Bigelow, etc. sans oublier les
caractères du minitel don je cherche toujours l'auteur, un « ingénieur »
m'a-t-on dit avec beaucoup de condescendence). 
Cette pixelisation a été utilisée non seulement pour les photocompos,
mais aussi pour les imprimantes à aiguilles, à jet d'encre etc.

La production de ces bitmaps par logiciel approchant le contour (par des
droites, puis des coniques, cubiques, etc.) remonte à au moins à la fin
des années 1960 (Vargo et Mergler aux USA, mais aussi très vite les
recherches en France de Couignoux, aux Miones de St Etienne, avant de
partir aux USA, Bloch, Guedj, 
Mi 1975 se créent les deux grandes boîtes de numérisation : URW à 
Hambourg et Bitstream aux US. Cette dernière a longtemps approché les
contours à l'aide d'arcs de cerckes. Et qu'on le veuille ou non, c'est
Adobe et son PostScript qui a popularisé les fontes vectorielles pour
utiliser un mot que je n'aime toujours pas !

P.S. Mes sources viennent de la thèse de Alan Marshall et de son
colloque à Lyon sur l'histoire de la photocompo, d'un vieil article
célèbre de Bigelow dans Scientific American (1983, traduit en français
dans La recherche), etc. 

-- 
Jacques André
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