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typographie - Re: [typo] Nouvelle version de BabelMap disponible - prend en charge Unicode 4.1

Objet : Liste consacrée aux discussions à propos de la composition et de la typographie

Archives de la liste

Re: [typo] Nouvelle version de BabelMap disponible - prend en charge Unicode 4.1


Chronologique Discussions 
  • From: Jean-François Roberts <jean-francois.roberts AT wanadoo.fr>
  • To: <typographie AT listes.irisa.fr>
  • Subject: Re: [typo] Nouvelle version de BabelMap disponible - prend en charge Unicode 4.1
  • Date: Mon, 26 Dec 2005 11:51:24 +0100



> De : Patrick Andries 
> <patrick AT hapax.qc.ca>
> Répondre à : 
> typographie AT listes.irisa.fr
> Date : Sun, 25 Dec 2005 08:08:00 -0500
> À : 
> typographie AT listes.irisa.fr
> Objet : Re: [typo] Nouvelle version de BabelMap disponible - prend en
charge 
> Unicode 4.1
> 
> Jean-François Roberts nous écrivait :
> 
>> Pour mémoire, rappelons que l'"Anglais" Wylie était enseignant à
>> l'université de... Washington, et qu'il publia son système de
>> translitération ("romanization") du tibétain dans le oh si britannique
>> _Harvard Journal of Asiatic Studies_ (1959) ! Dans cette étude, il passait
>> d'ailleurs en revue quelque 12 systèmes de transcription/translittération
>> antérieurs, avant de proposer le sien - qui a fini par l'emporter en
>> Occident, pour les besoins, encore une fois, d'édition scientifique, de
>> cataloguage, etc.
>
>
> Pour mémoire rappelons que les Américains parlent encore anglais. Je ne
> pense pas avoir dit britannique.
> 
>> Vos remarques semblent confondre deux critères : une transcription plus ou
>> moins "phonétique" (en évitant les symboles API/IPA,
>
> 
> API fera très bien l'affaire en français pour décrire l'objet.
> 
> Rappelons que l'API ne peut être utilisé dans les noms des caractères de
> normes comme l'ISO 8859 et 10646, car elles se sont imposées un
> répertoire de caractères très limité (ceci n'est à nouveau pas de mon
> fait, pour certaines je n'étais même pas encore né à l'informatique).
> Les versions anglaises ont un répertoire de signes plus pauvre que les
> versions françaises (qui acceptent les diacritiques français, le c
> cédille et le n tilde).
> 
> 
Encore une fois, cette restriction est de simple bon sens : une écriture en
API/IPA non seulement ne sera pas intelligible au lecteur moyen, sans avoir
étudié le système phonologique de la langue considérée - et sans avoir
maîtrisé le système de symboles phonologiques établi par l'International
Phonetic Association -, mais encore NE REPOND PAS A CE QUI EST LA RAISON
D'ETRE DE L'UNICODE.

Vous semblez en effet commettre l'erreur cardinale - qui informe tout le
reste de votre développement - d'oublier que l'unicode sert à coder des
SIGNES et non des SONS. Dans tout système d'écriture, ou presque, un même
signe pourra correspondre à plusieurs sons, *et inversement*. Envisager que
l'IPA puisse être d'aucune manière une solution possible au problème est
donc se fourvoyer du tout au tout.


>> Pour donner un exemple simple, pour un personnage connu de la Belle Epoque,
>> la translittération scientifique
>
> une translittération
> 

Je ne connais aucune translittération scientifique du russe qui donne autre
chose que "Kropotkin" dans le cas d'espèce. Toutes ces translittérations
sont d'ailleurs, en dernière analyse, des variantes du système
d'alphabétisation latine adopté pour le tchèque puis (avec certaines
différences mineures) pour le croate - avec les adaptations nécessaires,
bien entendu.

D'où ma référence à "la translittération scientifique", pour le russe. Les
divergences entre systèmes ne portent guère que sur des lettres telles que
le "x" cyrillique, ou l'utilisation ou non de consonnes avec caron - ou
encore le traitement des signes "dur" et "mou", ou des voyelles "mouillées"
("je"/"ja" ou "ye/"ya", par exemple), etc.

>> donnera "Kropotkin". Une trancription a
>> minima, en français, donnera "Kropotkine" (mais "Kropotkin" en anglais).
>
>
> 
>> Mais une transcription fidèle donnerait "Krapotkine" en français (ou
>> "Krapotkin" en anglais ou en allemand), du fait du phénomène d'alternance
>> vocalique dans les langues slaves (suivant sa place dans le mot,
>> relativement à la syllabe tonique, en russe, le "o" pourra se prononcer de
>> *trois* façons différentes !)
>
> Da, da. Ya znaiou.
> 
>> . Certains ouvrages de référence allemands de
>> la fin du XIXe siècle donnaient d'ailleurs régulièrement l'entrée
>> "Krapotkin" (sic).
>
>> Les choses se corsent, dès qu'on passe aux consonnes... Ainsi, l'architecte
>> de la victoire de l'Armée rouge sur l'Allemagne nazie s'apellera simplement
>> "Z^ukov" ("Z^" = "z caron" cap.), en translittération scientifique ; mais,
>> en transcription, il s'agira de Joukov en français, Zhukov en anglais,
>> Schukow en allemand (mais "Shukow" en ex-RDA...), Sciukov en italien, etc.,
>> etc.
>
>> Vous comprenez pourquoi la tendance moderne est - massivement - à la
>> translittération.
>
>
> Nous en avons déjà longuement discuté, tout dépend du public visé. Si
> celui-ci est le grand public, je préfère la transcription (il saura
> comment prononcer). S'il s'agit d'un texte scientifique, à l'heure
> d'Unicode, vous comprendrez que les innombrables romanisations ont un
> gentil air désuet (et un peu colonial). Plutôt que d'essayer de trouver
> un nième système encore un peu plus complet pour l'arabe, le tibétain,
> le mongol, le khmer, le lao, il est plus simple pour les spécialistes de
> simplement écrire en arabe, en tibétain, en mongol, en khmer et en
> laotien. Restent les cas comme Unicode ou l'ISO 10646 qui se sont imposé
> des répertoires "romains" restrictifs mais sans prétention scientifique
> quant à la justesse des noms transcrits ou translittérés.
> 

Encore une fois, vous confondez à plaisir (et là, j'insiste sur le terme
"confusion") plusieurs registres.

Il n'y a *rien* de "colonial" à user d'un système "romanisé" pour traiter
d'une langue ne s'écrivant pas d'ores et déjà en alphabet latin.

Plus que le colonisateur français, c'est le mouvement nationaliste
vietnamien qui a imposé l'adoption systématique, à partir de 1945, du quoc
ngu - le système usant d'un alphabet latin modifié, élaboré par les jésuites
portugais et français - pour écrire le vietnamien. De ce fait, ils
tournaient le dos au chu nho (écriture en caractères chinois) et au chu nôm
(système "vietnamisé", héritier du chu nho).

Le pinyin chinois n'est de même aucunement une manifestation "coloniale",
mais bien le pur produit du nationalisme du Guomindang (alias
Kouo-min-tang), soucieux de modernisme et de rationalisation - pour lutter
contre l'emprise coloniale (ou impérialiste, plutôt) des grandes puissances
européennes (et du Japon)...

Mutatis mutandis, on dira la même chose de la volonté de privilégier le kana
aux dépends du kanji, pour le japonais, ou le hangul aux dépends du hanja,
pour le coréen. Et, bien entendu, pour la réforme du turc imposée par
Atatürk.

Et c'est rigoureusement le *même* souci de rationalisation qui pousse les
spécialistes de ces pays, et de ces langues, à unifier les systèmes
permettant de transcrire ces langues.

Il ne s'agit donc aucunement de proposer "un nième système encore un peu
plus complet", mais bien, pour la communauté scientifique, pour chacune des
langues et/ou systèmes d'écriture considéré, de s'accorder sur un système de
translittération ou de transcription commun - quelles que soient
(inévitablement) ses carences et ses imperfections. C'est ce qui a assuré le
succès du pinyin pour le chinois, malgré les critiques justifiées dont ce
système fait l'objet, même dans le contexte bien défini de la transcription
du mandarin, en soutien - plutôt qu'en remplacement - des caractères chinois
(hanzi).

Et c'est ce qui a amené les lexicographes des pays usant de l'alphabet latin
à aligner leurs pratiques sur ces systèmes "unifiés" - le cas échéant, avec
quelques aménagements (ainsi, la simplification, pour les noms propres
russes, de certaines finales de mots en "ij", réduites à "i" : Gorki,
Tchaikovski, etc. ; et des solutions permettant d'éviter l'emploi du caron,
pour les langues où ce diacritique n'est pas usité).

Ce qui permet d'éviter de se poser la question - sauf pour les noms propres
(et certains noms communs) dont la graphie a été consacrée par un long usage
courant, dans la langue européenne "cible" (d'arrivée, si vous préférez) -
de se demander, donc, à quelle lettre de l'alphabet se situera l'entrée
cherchée...

Au lieu d'hésiter - par exemple - entre Tch'ong-King (EFEO), Tchong-King
(EFEO simplifié ou "des dictionnaires"), Tchoung-King (ancienne graphie des
dictionnaires Larousse), Ch'ung-ch'ing (Wade-Giles), Tschung-tjing
(Lessing-Othmer : sytème allemand), voire Ciung-King (Bortone-Allegra :
système italien), on se reportera - une fois pour toutes - à Chongqing
(pinyin). Ouf ! (Et je n'ai cité ni la version en système Yale, ni celle en
"Postal pinyin", ni le système hongrois, ni les multiples systèmes qui se
sont succédé à Taiwan...)

Proposer de remplacer cette graphie unique, en alphabet latin, par... les
caractères chinois d'origine est simplement plaisant. D'autant que vous
n'aurez fait que déplacer le problème, en l'occurrence, que l'adoption du
pinyin était censée pallier : caractères traditionnels ? ou simplifiés ?

Ajoutons que cette "solution" impose au lecteur d'avoir appris les 4 000
caractères (et les 214 "clés") qui forment le sine qua non de toute lecture
soutenue du chinois. Autant dire que la communication entre "spécialistes"
(sinologues, sinisants, spécialistes de littérature ou de philosophie
chinoise, du bouddhisme, etc.) et le commun des mortels (mais encore entre
ces spécialistes et les praticiens d'autres disciplines connexes, pratiquant
d'autres langues) - toute communication, donc, deviendrait impossible.

C'est précisément à ce type de communication (interdisciplinaire, en
particulier) que servent les systèmes de romanisation (translittération ou
transcription) - mis à part le problème d'accès aux polices adéquates, et de
saisie. Ils permettent au lecteur qui n'a pas maîtrisé les deux ou trois
douzaines de systèmes d'écritures et les centaines de langues et dialectes
que comptent le sous-continent indien et le Sud-Est asiatique, par exemple,
de poursuivre une recherche qui soit simplement possible, et d'avoir des
échanges avec des confrères s'intéressant à la même aire de diffusion
culturelle. 

Le bon usage sinologique consiste d'ailleurs à donner la version pinyin du
terme considéré, accompagnée des caractères chinois (éventuellement en
versions traditionnelle *et* simplifiée), du fait de l'excessive ambiguïté,
en général, de ladite version pinyin (la pauvreté phonologique du mandarin,
n'admettant que quelque 400 syllabes distinctes, abstraction faite du
système tonal, produit en effet de nombreux caractères homophones). Mais une
telle solution est exclue, vous l'admettrez, dans le _Petit Larousse_, où ça
n'aurait guère de sens - pas plus que d'indiquer la graphie en devanagari
d'un terme hindi ou sanscrit, ou la version d'origine d'un mot arabe ou
persan.

Ainsi, l'usage de ces systèmes permet, fort simplement - et avec une grande
économie de moyens -, de pointer le fait que le terme vietnamien pour
l'écriture "latine", "quoc ngu", correspond aux deux caractères chinois (en
système "chu nho", donc, c'est-à-dire l'écriture qui prévalut au Viêtnam
pendant deux millénaires, accompagnée du "chu nôm" dérivé durant les
derniers siècles) qui se lisent, en mandarin (pinyin), "guoyu" -
c'est-à-dire "langue nationale", ce qui est le sens même de "quoc ngu" en
vietnamien. 

Ce passage du mandarin au vietnamien sera rendu plus intelligible par la
référence au cantonais (yue), où les mêmes caractères sont lus "gwokjyu"
(système de la Language Society of Hong Kong [LSHK]) ou "guogyü"
(transcription officielle de la province du Guangdong pour la langue de
Guangzhou [Canton], ou Guangzhouhua pinyin fang'an en... mandarin/pinyin).

Ce terme, en chinois, est d'ailleurs un des synonymes désignant... le
mandarin : "guoyu" (langue nationale) est ainsi la terminologie consacrée,
pour "mandarin", à Taiwan - alors que la République populaire préférera
"putonghua" (langage commun), voire, de façon prêtant plus à controverse,
"hanyu" (langue des Han). "Mandarin" (importation portugaise, via... le
sanscrit et le malais) est en fait une adaptation d'un autre synonyme pour
ce parler : "guanhua", ou "langage des fonctionnaires", "langage officiel".
(On notera que, en chinois, "yu" renvoie à la langue *parlée", et "wen" à la
langue *écrite*, "hua" au langage en général. Le terme "zhongwen" désigne
ainsi la langue chinoise *écrite*, en hanzi, et donc indépendante des
langues ou dialectes particuliers.)

On pourra, bien entendu, compléter cette démonstration fort simple en
invoquant les transcriptions IPA : mandarin "guoyu" [/kwo y/], cantonais
"guogyü"[/kwo:k jy/], vietnamien "qoc ngu" [/kwok ngw/] - la voyelle du
premier mot étant en fait le "o" ouvert (ou "c" inversé dans la symbologie
IPA) pour les versions chinoises (le /o/ normal pour le vietnamien) ; et,
pour le deuxième terme vietnamien, la consonne correspondant au "ng" de
l'anglais "king", suivie de la voyelle symbolisée par un "m inversé" en
symbologie IPA. 

Mais on voit que ces moyens supplémentaires ne font que préciser ce qui
était intuitivement évident, dès la transcription fournie pour les trois
langues : et c'est que le vocabulaire vietnamien contient un nombre
important d'emprunts directs au chinois, plus particulièrement du cantonais
limitrophe... Ceci, dans les versions simplifiées (sans diacritiques)
faisant abstraction, donc, des tons dans chacune de ces langues, ainsi que
de la qualité particulière du "o" et du "u" vietnamiens. Et sans même entrer
dans les considérations de phonologie historique (la finale en -/ok/ a
disparu en mandarin moderne, avec les tons qui s'y appliquaient, en
particulier). Importance des emprunts qui a alimenté nombre de spéculations
sur la classification du vietnamien, dans les familles linguistiques
asiatiques : langue du groupe mon-khmer (thèse actuellement généralement
admise) ou sino-tibétaine ?

En revanche - avec la même économie de moyens -, on montrera que le Tonkin,
province septentrionale du Viêtnam, ainsi nommée de l'ancien nom de sa
capitale, l'actuelle Hanoï, tire son nom (quoc ngu : "Dong Kinh") des
caractères qui se liront de même Dongjing en mandarin (pinyin), signifiant
"Capitale de l'Est" - correspondant ainsi à Pékin, alias Beijing ("Capitale
du Nord"), et Nankin, alias Nanjing ("Capitale du Sud").

Mais ces mêmes caractères, en japonais, se liront... Tôkyo (transcription
Hepburn). Si l'on écrivait tout en caractères chinois (hanzi chinois, han tu
du chu nho vietnamien, kanji japonais), comme vous le suggérez, Tonkin,
Donjing et Tokyo seraient *le même mot* (le même groupe de deux caractères,
inchangé d'une langue à l'autre). En transcription latine, on voit
instantanément la proximité du vietnamien et du mandarin et, a contrario, la
distance linguistique du japonais. (Oui : en mandarin, "Tokyo" se dit
"Donjing", de même que la province septentrionale du Viêtnam.)

Rien de "désuet", donc, dans l'exigence de systèmes scientifiques de
translittération ou de transcription. Et proposer d'en revenir - pour les
langues à alphabets, abjads ou abugidas - aux "transcriptions" qui
permettent d'écrire (par exemple) les nom et prénom de Muammar al-Kadhafi
de... 32 façons différentes serait un sérieux pas en arrière.

En venir au système que vous semblez préconiser (mais vous allez sûrement
soutenir que vous n'avez rien préconisé de tel : relisez-vous donc supra), à
deux vitesses : transcriptions pour le "grand public" (qui n'y connaît rien)
et graphies d'origine (alphabet arabe ou cyrillique, devanagari ou
caractères chinois, par exemple) pour les "spécialistes" (qui n'ont pas
besoin, selon vous, de transcriptions ou de translittérations) imposerait de
tels dommages, en termes de perte de fonctionnalités et de communication,
qu'une telle proposition ne sera jamais acceptée, bien entendu. Surtout,
elle dénote chez son auteur un sérieux manque de pratique et des
dictionnaires et de la recherche tout court.


>> Venons-en donc à la deuxième confusion
>
> Il n'y a pas confusion, mais mention délibérée des deux dans le cas du
> tibétain ou traduction du concept.
> 
>> de critères : on préférerait donc
>> (dans les milieux "inféodés aux Anglo-Saxons", comme le dirait sans doute 
>> un
>> autre colistier) une translittération "anglaise" (sic) à une noble
>> tranlittération chinoise (pinyin fangan), ce qui serait gênant... pour les
>> pauvres Tibétains eux-mêmes !!!!!!!!!!
>
>
> De quoi parlez-vous ? Cette romanisation chinoise (qui n'est pas
> nécessairement du pinyin, cf. le cas du yi qui utilise des consonnes
> pour noter les tons) n'a pas été choisie par Unicode.
> 
> Que je sache, en Chine, on a par exemple cherché à améliorer Wylie en
> notant les a-tchoung et a-tchen (considérées comme des consonnes dans la
> plupart des grammaires tibétaines et notées à l'aide de ' et a en Wylie)
> par des v et des x.
> 
> 

Respirons un bon coup. En mandarin, "pinyin" veut dire - peu ou prou, mais
ni plus ni moins - "transcription". De ce fait, *tout* système de
transcription pourra être désigné par une expression contenant ce terme.

Par défaut, on désigne par "pinyin" (tout court) le système officiel adopté
par la République populaire de Chine en 1958, et officialisé en 1979, sous
le nom de "hanyu pinyin" ("transcription de la langue chinoise", ce qui doit
s'entendre comme "transcription du mandarin" : voir mes remarques supra).
Mais de nombreux "pinyin" ont été proposés pour les diverses langues et
nombreux dialectes de Chine, sous l'appellation générique de "pinyin
fangyan" ("transcription dialectale"). L'ultime mouture du système en
vigueur à Taiwan, qui se démarque relativement peu du "hanyu pinyin", reçoit
l'appellation de "tongyong pinyin" ("transcription usuelle").

On a vu que le système proposé pour le cantonnais (appelé à figurer dans
toutes les publications officielles de la province de Guangdong,
dictionnaires compris) s'appelle ainsi "Guangzhouhua pinyin fang'an"
("Projet de transcription de la langue de Guangzhou"). De même, la
transcription chinoise du tibétain pourra recevoir l'appellation de pinyin.
Ceci, indépendamment du fait qu'elle utilise tel ou tel système de
transcription. En tout état de cause, la romanisation chinoise du tibétain
n'est *pas* le système Wylie, ni même une forme de "Extended Wylie".

Le tibétain n'étant pas une langue tonale, votre remarque à ce propos est,
en l'occurrence superfétatoire. Surtout, il n'est pas besoin de faire appel
à la romanisation du Yi (votre référence prouve surtout que vous avez suivi
les discussions aboutissant à l'inclusion du syllabaire normalisé Yi, ou
plutôt du dialecte Yi du district de Liangshang, dans la version 3.0 de
l'Unicode) - il n'est pas besoin de se référer à la transcription un peu
obscure d'une langue parlée par une des ethnies non han, donc, pour trouver
des emplois de lettres pour indiquer les tons. Ce qui indique votre peu de
familiarité avec la question.

Résumons : issue d'une longue tradition chinoise d'analyse phonétique et
phonologique (illustrée par la tradition des grands "dictionnaires de
rimes", regroupant les caractères selon leur *prononciation* [en mandarin],
ce qui permettra le développement à l'ère moderne de la phonologie
historique du chinois), la première réalisation en ce sens n'était pas une
romanisation du tout. Il s'agissait en fait d'une ultime rationalisation,
sous l'égide du Guomindang, du système "fanqie" d'analyse phonologique,
utilisant des caractères types pour représenter les initiales, d'une part,
et les finales (les "rimes" de la tradition), d'autre part. La
simplification du système, et de la forme de ces caractères types donna les
37 glyphes (21 initiales [consonnes], 16 finales) du système dit Zhuyin
fuhao ("symboles phonétiques"), ou initialement "zhuyin zimu" ("alphabet
phonétique") - et plus souvent désigné par son appellation populaire de
"bopomofo", du nom des 4 premiers caractères de cet "alphabet". Le système
incluait, bien entendu, une notation pour indiquer les tons du mandarin.

Adopté en 1912-1913, le zhuyin fuhao (par la suite gratifié du titre plus
ronflant de "guoyu zhuyin fuhao" : "symboles phonétiques du mandarin", alias
Mandarin Phonetic Symbols) allait servir de soubassement aux développements
qui suivirent, en termes de romanisation désormais.

Le premier système, promulgué en 1928, répondait au doux nom de Gwoyeu
romatzyh (hanyu pinyin : "guoyu luomazi", c'est-à-dire "romanisation du
mandarin", "luoma" étant l'exonyme mandarin de... la ville de Rome).
Terriblement compliqué, il reposait en effet sur une transcription "de base"
pour chacune des syllabes du mandarin, cette graphie étant ensuite modifiée
suivant un certain nombre de règles précises, pour indiquer le ton - sans
jamais user de diacritiques, mais uniquement des modification et additions
de lettres. Pour donner un exemple "simple" (et trompeur quant à la
complexité réelle du système complet), la voyelle (syllabe) "a" s'écrira,
suivant le ton : a, ar, aa, ah. Mais au hanyu pinyin "chun" correspondront,
respectivement : chuen, chwen, choen, chuenn.

Arrêtons là. Vous comprendrez que, même à Taiwan, pourtant tétanisée dans le
respect des grandes ¦uvres du Guomindang, ce système (largement concurrencé,
à Taiwan même, par le Wade-Giles infiniment plus simple) finit par être
remplacé, en 1986, par le système dit "Mandarin Phonetic Symbols II" (eh oui
! "guoyu zhuyin fuhao ershi") ou MPS II, simplification du gwoyeu romatzyh
par abandon des variantes tonales, seules les graphies "de base" étant
retenues. Ce système sera enfin abandonné à son tour en 2000, au profit du
tongyong pinyin, déjà cité, plus largement aligné (à 80 %) sur le hanyu
pinyin.

Pour plus de détails sur le gwoyeu romatzyh :

http://www.pinyin.info/romanization/compare/gwoyeu_romatzyh.html

Et, pour les règles de ce système :

http://www.pinyin.info/romanization/gwoyeu_romatzyh/spelling.html

(Ah oui ! Chongqing, en gwoyeu romatzyh ? rien de plus simple : Chongchinq.
Aïe !)

Pour en revenir à la translittération du tibétain : le système choisi par
Unicode n'est en effet pas le système chinois adopté par le GENUNG pour les
noms géographiques (pinyin, c'est-à-dire transcription officielle chinoise,
qui n'est, bien entendu, pas le hanyu pinyin du mandarin). Le terme "pinyin"
est d'ailleurs indiqué par le rapport du GENUNG (alias UNGEGN) lui-même,
concernant le tibétain :

http://www.eki.ee/wgrs/rom1_bo.pdf

Tout le sens de ma remarque initiale était que ce genre de choix (pinyin ou
Wylie) est, en l'occurrence, tout sauf innocent.

>> Disons que, pour les Tibétains eux-mêmes, un système n'est pas plus
>> compliqué qu'un autre.
>
> Je tiens le fait que la variante du système Wylie utilisée dans Unicode
> dérouterait la majorité des tibétains d'une personne (britannique)
> connaissant le tibétain et s'étant rendue sur place. Je pense qu'elle
> peut juger et dire si Wylie modifié est plus compliqué ou non que la
> traduction du concept . Cf U+0FD0 : FIORITURE TIBÉTAINE POUR DONNER UN
> ORDRE par rapport à TIBETAN MARK BSKA- [sic plutôt que BKA-] SHOG GI MGO
> RGYAN). Rappelons que le nom anglais de certaines de ces fioritures est
> faux : dans un cas le signe indique une situation hiérarchique inverse
> au nom translittéré en anglais, ce qui a entraîné, dans l'autre cas,
> quand on s'est rendu compte de la méprise et qu'on a introduit la
> fioriture suivante dans une version ultérieure d'Unicode la création
> d'un nom "tibétain" inventé de toute pièce puisque le nom traditionnel
> du signe était déjà pris par le mauvais caractère!
> 
> Unicode (anglais) représente l'apostrophe de Wylie  par le signe "-".
> Notons que Wylie a aussi ses faiblesses : il ne permet pas de
> représenter les lettres tibétaines utilisées pour écrire le sanscrit, la
> transcription du a-tchoung et a-tchen sont sujets à débat, il ne permet
> pas de noter de manière non ambiguë certains empilements tibétains (par
> exemple la translittération de mantras) ni de noter plusieurs signes de
> ponctuation de base. Bref, on en revient à pourquoi ne pas simplement
> écrire en tibétain si on tient à respecter la graphie tibétaine dans les
> textes scientifiques et ne pas décrire en langage commun pour les textes
> destinés au grand public ?
> 

Voir mes remarques antérieures.

> 
>> Vous noterez la subtile distinction entre "romanisation tibétaine (Wylie)"
>> et "romanisation chinoise (pinyin)".
> 
> Wylie est tout à coup devenu tibétain (il a pourtant enseigné à
> Washington...;-))
> 

Oui... et Zhao Yuanren (alias Yuen Ren Chao), le principal architecte du
Gwoyeu Romatzyh, a enseigné à Harvard...


> Je pense qu'ici il ne s'agit pas de la romanisation du nom tibétain en
> pinyin mais de la romanisation du nom "mandarin" pour ces toponymes
> tibétains en pinyin. Mais j'avoue ici ne pas avoir lu plus que votre
> citation où l'on voit bien une opposition entre "Tibetan script, Tibetan
> romanization" et "Chinese characters, Chinese romanisation (pinyin)".
> [tiens, amusant cette alternance -zation/-sation dans la même phrase..]
> 
>
>> Disons simplement que la position que vous défendez ici
>
> 
> Je pense que vous n'avez pas compris notre "position" : devant la
> confusion des systèmes (une nième variante de Wylie dans Unicode
> anglais, cf. le - pour '), nous avons plusieurs fois opté pour la
> traduction (par exemple dire "trois pierres blanches" plutôt que "rdel
> dkar gsum"), sinon nous avons suivi le système Wylie modifié par Unicode
> en corrigeant les fautes connues, mais passées inaperçues lors de la
> révision du texte anglais, et ajouté en annotation une transcription
> française pour indiquer la prononciation moderne des mots (la graphie
> tibétaine s'est figée au XIe siècle).
> 
> 
Encore une fois, vous vous méprenez sur la raison d'être de l'Unicode, qui
n'est pas de coder des sons, mais des signes : il est donc absolument non
pertinent de poser le problème de l'adéquation ou non de l'orthographe
tibétaine à la prononciation actuelle du tibétain. Voir mes remarques
liminaires. Une bonne variante type "Extended Wylie" suffit largement, une
fois le parti pris de ne pas opter pour le pinyin.

> P. A.
> <http://hapax.qc.ca>
> 
> 
> 





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