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typographie - [typo] Typographe en Suède

Objet : Liste consacrée aux discussions à propos de la composition et de la typographie

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[typo] Typographe en Suède


Chronologique Discussions 
  • From: "Eric Angelini" <Eric.Angelini AT kntv.be>
  • To: <typographie AT listes.irisa.fr>
  • Subject: [typo] Typographe en Suède
  • Date: Wed, 30 May 2007 17:07:30 +0200
  • Return-receipt-to: "Eric Angelini" <Eric.Angelini AT kntv.be>


Les coléoptères menacent les forêts du sud de la Suède

LE MONDE | 30.05.07 | 15h17  *  Mis à jour le 30.05.07 | 15h17 

VÄXJÖ (SUÈDE) ENVOYÉ SPÉCIAL  

D'un coup de couteau, Alrik Karlsson, un paysan de 78 ans, entaille le tronc 
de sapin couché dans sa forêt de Norra Torpa, à quelques kilomètres de Växjö, 
dans le sud de la Suède. Il a repéré l'endroit où tailler grâce à un petit 
amoncellement de sciure couleur brique. Découvert, un coléoptère noir d'un 
demi-centimètre tente de disparaître dans l'étroite galerie qui s'enfonce 
sous l'écorce. Il peut y avoir jusqu'à 4 000 individus par arbre. 
 Ce coléoptère amateur d'épicéas s'appelle le typographe. Il doit son nom aux 
galeries qu'il imprime dans le bois et constitue aujourd'hui la principale 
menace qui pèse sur les forêts du sud du royaume. Des printemps et des étés 
plus chauds, ajoutés à une fréquence élevée de tempêtes qui ont déraciné 
d'énormes quantités d'arbres, ont favorisé la prolifération du coléoptère.

"On peut y voir un effet du réchauffement climatique, même s'il est trop tôt 
pour établir un lien formel", note Bo Langström, spécialiste de la protection 
des forêts à l'université agricole suédoise d'Uppsala. De son côté, l'Office 
des forêts a déclenché l'alerte depuis plusieurs semaines, tant la situation 
s'annonce critique pour cet été.

Autour d'Alrik Karlsson, la forêt est retournée, dévastée, tapissée de 
branches brisées. Des souches à moitié déterrées parsèment des clairières qui 
étaient des forêts il n'y a pas si longtemps. "Les souches les plus sombres, 
c'est Gudrun. Les plus claires, les plus récentes, c'est Per", explique 
l'exploitant. Deux prénoms pour deux tempêtes qui ont ravagé le sud du pays, 
l'une en 2005, l'autre en 2007.

En dépit de la mobilisation après le passage de Gudrun, d'énormes quantités 
de bois sont restées sur le carreau, ce qui a permis aux typographes de 
coloniser ces arbres sans défense et de se développer. "Ils étaient pourtant 
encore assez peu nombreux", souligne Nils Mitsell, consultant en santé des 
forêts.

Mais la sécheresse de 2006 a tout fait basculer, avec un premier essaimage 
dès avril, qui a pris tout le monde de vitesse. "Pour la première fois depuis 
les années 1930, il y a eu deux générations de coléoptères en un seul été", 
explique Nils Mitsell.

La sécheresse a eu une autre conséquence : le manque d'eau a affaibli les 
arbres, qui sont devenus des proies faciles. "On estime à 2 millions de m3 la 
quantité d'arbres détruits par les typographes pendant l'été 2006", constate 
Lennart Svensson, responsable de la lutte anticoléoptères dans la région du 
Götaland. A la fin de l'été, la plupart des troncs d'arbres victimes de 
Gudrun avaient toutefois été enlevés.

La situation s'est encore aggravée avec la tempête Per, en janvier. Moins 
violente que Gudrun, elle s'est révélée plus sournoise car les arbres 
arrachés se sont trouvés plus dispersés, et donc plus compliqués et coûteux à 
enlever. Le "garde-manger" a été renouvelé et l'on s'attend à une explosion 
des typographes cette année. Les premiers essaimages ont démarré dès avril, 
lorsque la température a atteint 18 oC. Les typographes s'attaquent même à 
des arbres debout, signe que les troncs morts ne leur suffisent plus.

"J'ai déjà perdu la moitié de ma forêt avec les deux tempêtes", s'inquiète 
Alrik Karlsson. Des pièges ont été installés un peu partout, contenant des 
phéromones, substances chimiques sécrétées par les animaux eux-mêmes. 
L'Office des forêts pousse les propriétaires à marquer, abattre et évacuer 
les arbres attaqués avant le 1er juillet, soit avant que l'animal adulte 
quitte l'arbre et que la nouvelle génération prenne son envol. Mais comment 
faire, alors que les machines et les camions manquent pour tronçonner les 
arbres et les transporter ? "On nous demande ces efforts, mais nous sommes 
voisins de réserves naturelles où il est soi-disant impossible d'intervenir 
et où les typographes se reproduisent à leur guise", s'insurge Alrik Karlsson.

Mais la malédiction du typographe n'est pas inéluctable. Si le nombre des 
typographes grandit au point qu'ils s'attaquent aux arbres sains, ils devront 
se mobiliser en grand nombre pour vaincre la résistance de ceux-ci. Une fois 
à l'intérieur du tronc, la concurrence pour se nourrir finira par faire 
décroître la population de coléoptères. De plus, les ennemis naturels du 
typographe - sangliers et oiseaux notamment - devraient enrayer sa 
progression d'ici quelques années. La question est de savoir si les 
forestiers suédois supporteront une calamité de plus. 

Olivier Truc
Article paru dans l'édition du 31.05.07.




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